La Flore
La richesse et la spécificité de la végétation camarguaise provient de la double influence de l’eau et du sel. En effet l’eau d’irrigation adoucit le nord du delta alors que l’eau de mer introduite dans la partie sud pour la production du sel accroît la salinité du sol. Dans ces conditions, les plantes halophiles sont prédominantes puisqu’elles s’accommodent des milieux salés. La plus représentative en Camargue est la salicorne : petit buisson d’herbes de couleur verte. Elle affectionne particulièrement le sol salé de la sansouïre et se tinte de diverses couleurs aux fils des saisons : verte au printemps, grise en été et plutôt rouge en hiver. Ses rameaux charnus stockent l’eau afin de diminuer la concentration en sel dans ses tissus. La salicorne est comestible, elle peut être utilisée comme condiment, macérée dans du vinaigre ou bien cuisinée comme des haricots verts d’où son surnom d’ « haricot de mer ».
Sur les sols moins salés, une végétation aquatique très riche s’est installée. La saladelle ou lavande de mer s’étend sous forme de tapis et colore les pâturages de son bleu tendre. Six variétés de saladelles sont présentes en Camargue. Elle rejette l’excès de sel absorbé par ses feuilles. Il suffit de les retourner pour en avoir la preuve. Rares sont les arbres pouvant supporter la salinité du sol, le tamaris se rencontre sur l’ensemble de la plaine sous forme de bosquets. Le roseau ou « canne de Provence » pousse sur le bord des étangs et forme des haies brise-vents de par sa robustesse. Il côtoie notamment des iris jaunes, des renoncules d’eau, des genêts et myosotis.
La pointe de l’Espiguette regorge d’une végétation typique des massifs dunaires. On distingue les plantes édificatrices de dunes comme l’oyat (graminée aux épis allongées) ou l’euphorbe de celles qui participent à la stabilisation des dunes comme le raisin de mer (petit arbuste vert à boules rouges), le panicaut (ou chardon bleu) et le lis des sables. Ce-dernier fleurit l’été au cœur des dunes et est protégé au niveau national comme de nombreuses autres espèces présentes en Camargue (ail petit moly, myosotis tenu…)
Les oiseaux
Située sur l’axe de migration entre le nord de l’Europe et l’Afrique, la Camargue est une halte migratoire importante pour de nombreux oiseaux d’eau et canards, ce qui en fait un site d’observation ornithologique hors pair. Plus de 150 000 oiseaux représentant plus de 250 espèces différentes transitent par la Camargue pendant leur migration ou y vivent tout au long de l’année. L’observation des oiseaux se fait au rythme des saisons. Lors des longues et belle journées ensoleillées de printemps, les oiseaux migrateurs reviennent d’Afrique. Ils s’arrêtent en Camargue pour se reposer et faire le plein de nourriture avant de continuer leur route vers le nord de l’Europe. Pour les espèces vivant en Camargue, la période nidification commence. C’est alors le meilleur moment pour observer les parades nuptiales et la construction des nids en vue de la période de reproduction qui arrive avec l’été. Une centaine d’espèces d’oiseaux nichent en Camargue durant la saison estivale. On peut alors observer des ardéidés (hérons cendré, aigrettes), des anatidés (canards, oies), des limicoles ou « échassiers » (bécasses, chevaliers, avocettes, huîtriers, cigognes) et des laridés (mouettes, goélands, sternes). De nombreux oiseaux comme le flamant rose ont pour habitude de se regrouper en colonies sur des îlots aux abords des étangs. Les arbres ayant servi à la nidification font maintenant office de dortoir. Les jeunes commencent à s’émanciper et se regrouper en vue de la future migration automnale. Puis vient le moment du regroupement. Les oiseaux migrateurs font de nouveau étape en Camargue avant de passer l’hiver plus au sud. De nombreux oiseaux viennent passer l’hiver en Camargue où les conditions de vies sont meilleures et la nourriture plus abondante que dans les pays du nord de l’Europe. Chaque année plus de 100 000 canards viennent ainsi s’installer en Camargue pour la période hivernale.
Parmi tous ces oiseaux, l’espèce la plus représentative de la Camargue est le flamant rose, qui est présent toute l’année dans la région. Au printemps, moment de la reproduction, sa population peut monter jusqu’à 30 000 individus. En effet la Camargue est l’unique lieu de reproduction des flamants roses en Europe. Ils se regroupent principalement sur l’étang du Fangassier, au sud-est de l’étang du Vaccarès, où un îlot artificiel a été créé en 1970 pour pallier à la destruction des îlots naturels et permettre ainsi aux flamants roses de continuer à se reproduire en Camargue. Les petits naissent de couleur blanche puis deviennent gris. Le flamant obtient son beau plumage rose aux alentours de 3-4 ans. Cette espèce a la particularité de créer des crèches : groupe de petits gardés par quelques adultes. Une dizaine de semaine après leur naissance, les petits prennent leur envol. A l’automne suivant certains effectueront leur première migration pour aller passer l’hiver dans des contrées plus chaudes. Le flamant rose se nourrit d’insectes, vers, poissons, graines de plantes aquatiques et de riz, ce qui engendre des conflits avec les riziculteurs camarguais. Cependant son met favori est l’artemia salina : un petit crustacé vivant dans les lagunes et marais salants. C’est sa haute teneur en carotène qui donne au flamant son beau plumage rose. Depuis 1979 et la mise en place de la Directive Oiseaux, le flamant rose est une espèce totalement protégée en Europe. Cette directive implique la protection des oiseaux mais aussi de leurs nids, de leurs œufs et de leurs habitats.
Le taureau Camarguais
Il existe deux races de taureaux présentes en Camargue. Le raço di biou (nom occitan) est présent en Camargue depuis la plus haute Antiquité. Ils vivent en manade (troupeau) de 150 à 300 têtes sur des terres impropres à la culture et se nourrissent principalement de roseaux et salicornes. Son pelage est brun foncé et ses cornes se dirigent verticalement vers le ciel en formant une lyre, ce qui en fait sa caractéristique principale. Le meneur du troupeau, le « simbeù » est un taureau castré portant le « redoun », cloche dont le son guide la manade. Ils sont élevés notamment pour fournir les taureaux qui serviront aux jeux dans les arènes et aussi pour la consommation de leur viande. Cet animal est petit et léger comparé aux autres races de taureaux ce qui lui confère une aptitude prédominante pour la course. Le taureau de Camargue est la seule race considérée en Europe comme étant encore sauvage. On dénombre 20 000 têtes suite au recensement de 2011. La race Brave ou de combat est quant à elle originaire d’Espagne et a été introduite en Camargue en 1869. Moins nombreux (environ 6 000 têtes) ces taureaux sont élevés en troupeau appelé ganaderia dans l’est du delta et sont exclusivement destinés à la corrida avec mise à mort. Ses cornes sont par contre dirigées vers l’avant contrairement à la race Camargue.
L’élevage des taureaux de Camargue se fait en liberté. D’avril à novembre ils se nourrissent dans la partie humide du delta au sud et remontent pour l’hiver dans les zones périphériques non inondables. Comme les poulains, les jeunes veaux âgés d’un an sont marqués au fer rouge, c’est ce qu’on appelle la ferrade. Elle permet à l’éleveur d’identifier ses propres bêtes et d’assurer la sélection et le suivi des familles, le cheptel camarguais étant soumis à un contrôle strict. C’est aussi l’occasion d’une grande fête avec les gardians. Durant toute sa vie, le taureau aura peu de contacts avec l’homme, seulement pour la ferrade, lors du regroupement des troupeaux pour la vente et lorsque le gardian veille à la bonne santé de sa manade. Le tri du bétail va permettre aux gardians de tester les animaux qui serviront à la course traditionnelle Camarguaise, de soigner ou bien de les mener à l’abattoir. Le tri du bétail est délicat et nécessite que les gardians aient une maîtrise parfaite de la monte à cheval afin d’écarter l’animal sans heurts et sans le blesser. Les taureaux inaptes aux jeux dans les arènes sont destinés à la consommation de leur viande, qui est de couleur rouge sombre et maigre, apparentée à du gibier. La viande de taureau bénéficie depuis 1996 d’un label Appellation d’Origine Contrôlée. Elle est fréquemment utilisée dans les recettes traditionnelles Camarguaises comme la gardiane, sorte de ragoût.